Huit à quatorze étudiants dans une chambre réservée à deux. La promiscuité et l’insalubrité au campus de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) rendent difficile les conditions de vie des étudiants.
Neuf heures à la cité des garçons du campus. A ce moment de la matinée, les lieux sont animés. Dans les chambres, les discussions vont bon train. A l’intérieur de l’une d’elles, un espace exigu, dix étudiants cohabitent. Une anomalie si l’on sait que cette chambre, désordonnée et insalubre, ne peut contenir que deux lits. Léon Djarisso est un des occupants. Agé de 25 ans, cet étudiant au département de Lettres modernes est en grande discussion avec ses colocataires. Sur les conditions de vie au campus, il n’est pas satisfait. « Nous vivons dans le calvaire. Nos conditions de vie sont désagréables. Il est très difficile de loger ici », se plaint-il. Pourquoi a-t-il donc choisi de loger au campus ? Il dit : « Je n’ai pas le choix. J’habite loin de l’université et je ne voudrais pas arriver en retard aux cours ».
Au niveau du service de l’hébergement du Centre des œuvres universitaires de Dakar (COUD), le problème de la promiscuité est connu. Pourtant les autorités ferment les yeux. Assis dans son bureau calme, propre et climatisé, Abdou Ndoye, le chef du service d’hébergement reconnait que le COUD est confronté à un problème de logement. Et, faute de capacité d’accueil suffisant, le phénomène de l’hébergement clandestin ou « clandotage » dans le jargon des étudiants est toléré. « Le clandotage n’est pas reconnu par le COUD. La règle c’est un étudiant un lit, mais compte tenu du déficit, nous laissons faire jusqu’à une certaine limite ».
A la cité Aline Sitoe Diatta (ex Claudel) réservée aux filles, la situation n’est guère meilleure. Douze étudiantes partagent une chambrette dans laquelle sont disposées trois lits d’une place chacun. Maigre consolation : une petite armoire et une petite douche intérieure sont à leur disposition. Aïssatou est l’une des occupantes. La vingtaine, voilée, cette étudiante en Sciences juridiques et politiques est hébergée par son amie. « Propriétaire d’un des trois lits de la chambre, elle m’a accordé la possibilité de loger avec elle », dit-elle tout en s’apprêtant à aller en cours.
Comparé à la situation au campus des garçons, Aïssatou ne se plaint pas trop. Pour elle, en plus de la promiscuité, « ils souffrent également du défaut d’hygiène ».
Cette situation d’insalubrité saute à l’œil nu. Abdoulaye en veut pour preuve la présence de toutes sortes d’insectes. Pour cet étudiant en Master 1 de Droit, « l’insalubrité et la promiscuité favorisent les risques d’infections ».
Le campus universitaire de Dakar ne compte que 4 917 lits pour 90 000 étudiants. Conscientes de ce large déficit, les autorités du Coud tentent de trouver des solutions. « Un programme de construction de deux nouveaux pavillons pour une capacité de 4 000 lits est en cours », rassure le chef du service d’hébergement. De bon augure certes pour les étudiants mais insuffisant pour une université qui d’année en année voit son effectif augmenter.
Aissata TOURE
ENCADRE
Hébergement : mode d’emploi
L’attribution d’un lit à l’université est gérée par la « Commission de codification », qui regroupe les autorités du COUD et les délégués des facultés. Seuls les étudiants ayant obtenu de meilleures notes peuvent en bénéficier. Des quotas sont attribués aux nouveaux bacheliers, aux étudiants étrangers et aux personnes handicapées. Selon les critères d’attribution, les étudiants en Master II ne peuvent pas codifier. Une caution de 5 000 francs CFA est exigée aux bénéficiaires qui doivent également s’acquitter d’un loyer mensuel de 3 000 francs CFA.
A. TOURE