Gorée, île sénégalaise au large de Dakar, est connue pour sa maison des esclaves et son histoire, l’un des symboles de la mémoire de la traite négrière en Afrique. Depuis 1978, elle est officiellement reconnue comme patrimoine mondial de l’humanité par l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco).Administrativement classée parmi les « communes d’arrondissement » depuis 1996, largement dépendante du tourisme, Gorée n’a pas été épargnée par l’apparition et les effets de la Covid-19.
Bientôt 12 heures à l’embarcadère. La chaloupe est enfin prête à partir. Des hommes, des femmes, des individus de tout âge, avec des masques au visage, montent pour rejoindre l’île.
Gorée, c’est le charme de ses vieux bâtiments et la nostalgie qu’ils évoquent. A peine sorti de la chaloupe et posé les pieds sur l’île qu’on croise un guide touristique. Baye Darou dit avoir 25 ans d’expérience.
« Ici à Gorée, 80% de nos avoirs nous viennent du tourisme. On n’a que cela comme ressource. Malheureusement, la fermeture de l’île a freiné nos activités comme ce n’est pas possible », explique-t-il, d’une voix plaintive. Il se souvient avec amertume les débuts de la pandémie et les conséquences immédiates des mesures qui étaient prises, notamment à Gorée.
« En toute franchise j’avais dans mon compte en banque 800.000 FCFA avant l’arrivée de la pandémie. Mais j’ai commencé à (les) dépenser peu à peu en me disant que je vais tenir le coup. Au bout de trois mois , je n’avais plus rien. J’ai même eu des dettes », ajoute-t-il.
La pandémie a asphyxié l’économie insulaire et aujourd’hui les touristes étrangers sont peu nombreux, malgré la remise en service des chaloupes. Gorée enregistrait 3.000 à 6.000 visiteurs quotidiennement avant l’arrivée de la pandémie selon un article du quotidien français Le Monde daté du juillet 2020. Mais à partir du 16 mars 2020, avec les restrictions liées à la Covid-19, seuls les quelques 2000 habitants de l’ile étaient autorisés à prendre les chaloupes pour s’y rendre.
Momar Sylla est depuis six ans gérant d’un restaurant dénommé « Chez Kiki », basé sur l’île. Selon lui, la Covid-19 a carrément plombé l’économie goréenne. « Heureusement que ces derniers jours, Gorée retrouve petit à petit son charme », déclare-t-il. Il se souvient, avec beaucoup de nostalgie, du bon vieux temps de l’île de Gorée, comme par exemple l’année 2013, lorsque le président Barack Obama visitait l’île.
Pour faire face à la Covid-19, les populations ont reçu de l’aide venant des autorités de l’île, mais Momar trouve que « c’était des subventions financières vraiment faibles, insuffisantes ».
À quelques mètres de Chez Kiki, se trouve le commissariat de Police de la commune de Gorée. Tout près de là, une femme, sac à la main marchant à pas lents sous le soleil de l’île. Elle s’appelle Ndeye Rama Mbodj, vendeuse de tableaux d’art.
« J’ai vécu difficilement la Covid-19. Je sais que je ne suis pas la seule. On ne voyait personne venir acheter nos produits », se plaint-elle. Une situation dramatique selon la dame dans sa quarantaine. A ses côtés, une de ses amies du nom de Arame Ndiaye. Elle est antiquaire. Elle aussi vend des objets d’art. Elle lui emboîte le pas et confirme les propos -de son amie. « Les clients ne viennent plus comme avant. La pandémie a tout gâché », s’exclame la femme âgée de 33 ans, précisant qu’elle n’avait pas un autre travail ou une activité alternative pour subvenir à ses besoins.
Cap sur la mairie de Gorée. Le bâtiment à l’architecture coloniale capte l’attention du visiteur.
Après quelques minutes d’attente, Tidiane Kamara, directeur de cabinet du maire de Gorée, reçoit l’équipe d’E-jicom-Info. D’emblée, il rappelle que Gorée n’a pas beaucoup de richesses économiques. « On n’a que le tourisme. Ici, s’il n’y a pas de visiteurs, il n’y a pas de vendeurs. C’est pour vous dire que Gorée a été très affectée par la Covid-19 », explique-t-il. Il soutient que la mairie de Gorée a vite réagi pour soutenir la population avec des distributions alimentaires et des kits d’hygiène.
Pour faire face à la pandémie, le gouvernement sénégalais avait mis en place un fonds « Force Covid-19 », d’une valeur de 1000 milliards de FCFA, selon des chiffres sur le site internet du ministère de l’Economie, du plan et de la coopération dont 15 milliards de francs CFA exclusivement destinés au crédit hôtelier et touristique. Mais ces mesures n’ont pas empêché la population de Gorée de traverser des situations compliquées.
En 2018, les recettes issues du tourisme représentaient au Sénégal près de 500 milliards de francs CFA, soit 7 % du Produit Intérieur Brut, selon le ministère du Tourisme. Gorée, qui fait partie des lieux les plus visités du pays a du coup subi de plein fouet les effets de la pandémie, et notamment les effets des restrictions sur les voyages.
Mouhamadou Lamine Diouf, L2 et Noura Oumar Ruth, L2