Malgré la Covid-19 et les mesures barrières mises en place au Sénégal, les gargotes, ces lieux de restauration pour le petit peuple, continuent d’être fréquentése.
Madame Ndiaye est une restauratrice qui travaille depuis 2019 à la Médina, vieux quartier jouxtant le centre-ville de Dakar. Elle est aidée chaque soir par ses enfants pour préparer et servir les mets qu’elle offre dans sa gargote. Elle porte un masque de protection et souvent des gants durant ses prestations. « En 2019 nous avions beaucoup de clients, mais maintenant, ce n’est plus ça », déplore-t-elle.
Les gargotes sont de petits restaurants de rue, construits à la va vite. Ils sont pour la plupart fréquentés par toutes sortes de gens, mais surtout par les personnes aux revenus modestes. De manière générale, les gargotes ne respectent pas toujours les normes d’hygiène.
L’apparition du premier cas de Covid le 2 mars 2020 au Sénégal a suscité une série de mesures, dont la limitation des rassemblements et l’observation des gestes barrières, dont la distanciation physique dans les lieux publics.
Dans les gargotes aussi les gens ont eu peur. «Depuis l’apparition de la Covid-19 les gens hésitent à acheter », explique Mme Ndiaye qui dit faire des efforts pour garder son lieu de commerce sain.
Dans le quartier populaire de la Médina, se trouvent nombre de ces gargotes. Dans un de ces restaurants de fortune tenu par des femmes originaires de Guinée, aucune mesure barrière n’est respectée. Ni vendeur, ni client ne porte de masque. La gargote est très bruyante. À l’entrée, le personnel fait la cuisine. La caissière assise sur sa chaise, se joint de temps en temps aux cuisiniers.
Pourtant, les autorités ont fixé, et parfois imposé, des mesures barrières pour limiter la propagation du virus : port des masques, lavage régulier des mains avec du savon ou une solution hydro alcoolique, tousser ou éternuer dans le coude ou dans un mouchoir à usage unique. Si aux moments de pic de la maladie, comme lors de la « 3è vague » en juillet et août 2021, les populations avaient commencé à se méfier de ces lieux de restauration bon marché mais sans grande hygiène, aujourd’hui, les populations sont redevenues moins craintives. Elles ont repris leurs habitudes dans les gargotes.
Fadel Castro, un jeune étudiant Comorien, établi au Sénégal depuis 2012, qui vit dans le quartier de la Médina, fréquente parfois ces gargotes. Il confie que ce « n’est pas très hygiénique, mais on fait avec. Avec la Covid je me méfie, mais même avant j’étais déjà méfiant ».
Monsieur Backa Diagne, nutritionniste et diététicien sénégalais, explique que manger dans les gargotes est risqué : « le fait que les gens s’y rassemblent en temps de Covid-19 pose problème. Il y a un grand manque d’hygiène et de réglementation dans ces lieux », affirme-t-il.
Tout ceci favorise les risques de contracter des maladies, chez les clients et même chez le personnel, et fait des gargotes, des lieux stratégiques de transmission du coronavirus
La majorité de ceux qui ouvrent des gargotes ne suivent pas toujours les règles administratives de l’ouverture des restaurants, ou même des snacks. Au Sénégal, avant d’ouvrir un service de consommation, quel qu’il soit (bar, restaurant, fast-food, gargote), « il faut impérativement avoir une autorisation de vente », explique le lieutenant Armand Seck, commandant de la brigade d’hygiène à Dakar.
En plus de l’autorisation de vente du préfet, les vendeurs doivent s’assurer d’être aptes physiquement et biologiquement, cela en faisant des visites médicales périodiques, chez des médecins agréés, ajoute le lieutenant. Les locaux doivent aussi être salubres, et c’est là où le service d’hygiène intervient, pour s’assurer que toutes ces règles sont respectées.
En principe, les contrôles par les agents du service d’hygiène au Sénégal dans les gargotes sont faits au moins une fois par mois.
Dans le quartier de la Zone A, à Dakar, Fallou Diagne tient sa gargote depuis 2015. Comme madame Ndiaye, la restauratrice de la Médina, Fallou est conscient des exigences de certains clients quand il s’agit de l’alimentation. Il affirme ne jamais avoir eu d’altercations avec les services d’hygiène, car il dit veiller sur la propreté de son lieu de travail. « Je porte mon masque, je désinfecte mes mains avec du gel, je porte des gants, à un moment, je n’acceptais pas de prendre l’argent à la main », déclare Fallou.
En tant qu’hygiéniste, le lieutenant Seck, commandant de la brigade d’hygiène à Dakar, dit sensibiliser les restaurateurs, leur personnel ainsi que les clients, afin que le nombre d’infections dans les gargotes soient limités. Un vrai défi.
Roly Ntoutoume L3, (avec Fatoumata B. R Faye, L3)