Bonnet Cabral ou «laafa Banjul »?
En laine, tricoté souvent en noir et blanc ou rouge et blanc, le bonnet Cabral ou «laafa Banjul » (bonnet de Banjul) est toujours à la mode au Sénégal. Si les uns l’ont sur la tête pour faire référence à Amilcar Cabral, figure emblématique de la lutte contre la colonisation portugaise en Guinée-Bissau, ce bonnet est pour les mourides un signe d’appartenance à leur confrérie.
Le port du bonnet Cabral ne symbolise pas la même chose au Sénégal. Porté en général par les mourides, il montre leur attachement à leur confrérie.
«Je ne savais pas qu’il s’appelle bonnet Cabral. Lorsqu’on était jeune, on l’appelait ‘Laffa Banjul’, car à l’époque, il provenait de la Gambie», soutient Ousseynou, la soixantaine, trouvé assis sous l’ombre d’un arbre à Grand Dakar.
Au milieu de ses amis mourides qui avaient tous le bonnet, il maintient que l’histoire du bonnet est liée au mouridisme.
«Quand on voit une personne qui le porte, on se dit qu’il est ‘talibé’», ajoute-t-il faisant référence à un terme communément utilisé pour désigner les disciples de Serigne Touba, fondateur de la confrérie des mourides.
« Je suis musulman et ‘mouride’. Ce bonnet symbolise mon amour envers Serigne Touba, et sa famille.Cabral ne m’intéresse pas»,renchérit Babacar Faye, un cinquantenaire, rencontré devant le Commissariat de la Médina de Dakar. Il dit avoir ce bonnet depuis 5ans.
«Les gens ne connaissent pas la signification de ce bonnet. Il le porte souvent pour le plaisir et la beauté ou parce que c’est l’effet de mode», a regretté Mokhtar Sylla, jeune vendeur de «café Touba» (un café faisant référence à Touba, la capitale du mouridisme). Installé à Grand Dakar, Mokhtar porte ce bonnet depuis plus de 20 ans.
Mais pour certains rappeurs, ce bonnet n’a aucune signification religieuse. Il symbolise le courage, l’engagement et l’esprit révolutionnaire du panafricaniste Amilcar Cabral.
« Cabral est notre idole, c’était un révolutionnaire, un homme engagé, un panafricaniste. C’est pourquoi on utilise le bonnet Cabral pour décorer les vêtements que nous faisons»,confirme Baye Sooley (nom d’artiste), rappeur et styliste sénégalais.
Loin du mouridisme et de l’implication de Cabral dans la lutte pour le continent noir, il y a également beaucoup de gens qui se parent du bonnet pour son aspect esthétique et par effet de mode.
«Je porte ce bonnet pour protéger ma tête du soleil. Je ne suis pas mouride et je ne connais même pas Amilcar Cabral», précise Babacar Cissé. Ce vendeur de livres «par terre », trouvé aux alentours de l’hôpital Abbas Ndao de Dakar est assis sous le soleil.
Mariama Diémè