«Le mariage d’enfants touche près de 33% de la société sénégalaise », a récemment dit le directeur national de World Vision Sénégal. Il s’exprimait lors du lancement de la campagne contre le mariage des enfants. Mais y a-t-il des données pour confirmer ce chiffre?
Par Antoine Sarr ( L3)
« Le mariage d’enfants concerne 33% des filles au Sénégal », a souligné le Dr. Andrew Catford, directeur national de World Vision, lors du lancement national de la campagne “Ensemble pour un Sénégal sans mariage d’enfants.”
Si l’on se réfère au code de la famille sénégalaise, le mariage ne peut être contracté qu’entre un homme âgé de plus de 18 ans et une femme âgée de plus de 16 ans, sauf dispense d’âge accordée pour motif grave par le président du tribunal régional, après enquête.
Selon World Vision, les nourrissons de mères âgées de moins de 20 ans ont des chances de mortalité nettement accrues. Les mères de moins de 15 ans ont 88% de chances de subir une fistule obstétricale.
D’ailleurs, les enfants ont profité de la tribune pour demander que l’âge légal du mariage soit relevé à 18 ans au lieu des 16 ans.
Les preuves fournies par World Vision
Ejicom-Info a contacté World Vision Sénégal pour demander les preuves de cette affirmation. L’organisation nous a redirigés vers son site avec les liens comme preuves.
Statistiques provenant d’autres sources
Dans le rapport de l’Unicef de 2015 sur les mariages d’enfants, grossesses précoces et formation de la famille en Afrique de l’Ouest et du Centre, des schémas similaires ont été observés au Sénégal, où les taux sont plus élevés parmi les Wolofs (30,7 % des 20-24 ans ont été mariées avant l’âge de 18 ans).
Chez les Poulars, le taux est de 49,9 % et bien plus faibles chez les Diolas (28,7 %). Les calculs s’appuient sur les enquêtes démographiques et de santé (EDS 2010-2011).
Source : Données issues de l’EDS Sénégal 2010-2011. Données géographiques issues du référentiel de données géospatiales, programme des enquêtes démographiques et de santé.
Source : Données issues de l’EDS Sénégal 2010-2011. Données géographiques issues du référentiel de données géospatiales, programme des enquêtes démographiques et de santé.
Comme le montrent les cartes ci-dessus, les mariages d’enfants connaissent un fort déclin au Sénégal depuis vingt ou trente ans. Cependant, l’ampleur et la rapidité de ce déclin varient considérablement d’une région à l’autre.
Ainsi, les mariages d’enfants demeurent une pratique très répandue dans le sud-est du pays, où la tendance n’a pratiquement pas évolué entre la cohorte des 45-49 ans et celle des 20-24 ans.
La seule région ayant connu une augmentation du taux de mariage d’enfants sur cette période est Tambacounda. Dans cette région, 51 % des femmes âgées de 45 à 49 ans se sont mariées avant l’âge de 18 ans, contre 57 % pour la cohorte plus jeune.
Le changement de tendance le plus marqué du taux de mariage d’enfants a été constaté à Matam (76 % des 45-49 ans contre 56 % des 20-24 ans).
Selon une étude soumise à la Ford Foundation, bureau de l’Afrique de l’Ouest, au Sénégal, la tendance du pays était élevée au départ en 2005 (18,3 ans) et a augmenté en 2011, à hauteur de 19,6 ans.
D’après le rapport de l’UNICEF State of the World’s Children 2016, 32 % des femmes sont mariées avant l’âge de 18 ans et 9% sont mariées avant l’âge de 15 ans au Sénégal.
En outre, dans le bulletin d’information du Bureau du Fonds des nations-unies pour la population (UNFPA) au Sénégal de septembre 2013, 16 % des femmes âgées de 25-49 ans étaient déjà en union avant d’atteindre l’âge de 15 ans, quatre femmes sur dix (40 %) étaient déjà en union en atteignant 18 ans et près de huit femmes sur dix (78 %) avant 25 ans.
Que retenir ? Les données disponibles indiquent que l’information est correcte
Andrew Catford, directeur national de World Vision a déclaré que le mariage précoce touche près de 33% des filles
Le rapport de l’Unicef de 2015 sur les mariages d’enfants, grossesses précoces et formation de la famille en Afrique de l’Ouest et du Centre a révélé que 32,9% des femmes âgées de 20 à 24 ans étaient déjà mariées à l’âge de 18 ans. Le phénomène touche 47,7 des femmes âgées de 45 à 49 ans.
La Fondation Ford et l’UNFPA ont publié des chiffres similaires. Nous estimons donc que la déclaration est globalement correcte.