A Dakar, les services de transfert d’argent sont en plein essor. S’ils font l’affaire d’usagers de plus en plus nombreux, les arnaqueurs également se frottent les mains.
Les services de transfert d’argent permettent d’épargner, d’envoyer et de recevoir de l’argent. Mais sur certains services de transfert, des failles de sécurité sont souvent décriées par les clients. Mme Fall est une cliente assidue d’un service de transfert d’argent de son quartier, à Dakar. Elle est commerçante. Pour ses transactions financières, elle a ouvert un compte auprès d’une de ces agences. Elle n’oubliera pas de sitôt ce qui lui est arrivé la veille du Magal de Touba. Alors qu’elle devait envoyer de l’argent depuis Dakar à destination de la cité religieuse pour les besoins de l’évènement. « Je déposais fréquemment de l’argent sur mon compte. Un jour, alors que je venais faire un envoi à mon frère qui réside à Touba, le gérant m’informe que mon compte n’est pas assez pourvu pour le service que je demandais. Après quelques vérifications, il m’informe qu’il a été piraté ». Pis, le gérant n’était pas en mesure de « me fournir des explications claires sur comment cela a pu se passer ». A ma grande surprise que l’argent que je demande n’est pas disponible », regrette-t-elle.
Son compte a été piraté. Et il lui est difficile d’expliquer comment s’est déroulé le piratage. Et aucune explication ne lui est donnée. Ce qui l’a même poussé à changer d’opérateur. « J’ai dû changer d’opérateur, puisque j’étais convaincue que le mal ne provenait pas du gérant du service ».
Ce jeune commerçant habitant à Sicap Baobab n’en revient toujours pas du mode opératoire utilisé pour le dépouiller. « Ils m’ont proposé un produit que je pouvais acheter et payer via mon compte. J’ai suivi toutes leurs instructions jusqu’à tomber dans leur piège »
Les opérateurs sur leur garde
Ils ont nombreux à tomber dans les pièges tendus par les arnaqueurs du Net. Sur son site, Western Union, service de transfert d’argent mondialement connu, met en garde ses clients, « Ils utilisent tous les moyens possible et imaginables pour contacter leurs victimes : le téléphone, la poste, les e-mails, et internet », lit-on sur le message d’alerte. «ils gagnent votre confiance et, une fois qu’ils vous ont convaincu, ils vous demandent de l’argent, s’en emparent et disparaissent. Les méthodes qu’ils utilisent pour vous attirer dans leurs filets changent constamment ».
Les clients ne sont pourtant pas les seuls pigeons à se faire déplumer.
A 13 heures, sa boutique ne désemplit pas. Pour cause, Salif, « prestataire de services », dit-il fièrement, offre tous les services de tous opérateurs de transfert d’argent de la place de Dakar.
Il faut donc prendre son mal en patience. Trente, Quarante-cinq minutes, presque une heure plus tard, voilà Salif habillé en jeans assorti d’une chelise bleue disposé à discuter rapidement. « C’est souvent ainsi. Les gens attendent la pause de la mi-journée pour effectuer, qui des envois, qui des retraits », dit-il, satisfait. Un sentiment qu’il n’éprouvait pas il y a peu, après qu’il a reçu la visite des hackers de services de transferts d’argent. « On ne les voit pas venir. C’est des fantômes. Ils piratent des comptes, les vide ; le tout ni vu ni connu », s’emporte Salif qui leur prête même des pouvoirs d’hypnose.
Selon Mor Sine, gérant d’un service de transfert, « l’arnaque via le net est monnaie courante… Les arnaqueurs opèrent en bande. Et on en est souvent victime. Un jour, 450 000 francs CFA ont été soutirés sur mon compte par des escrocs », se souvient-il.
Au niveau des opérateurs de services de transfert d’argent, l’explication est plus rationnelle. Il s’agit de failles sécuritaires vite détectées et corrigées. « Chaque utilisateur détient désormais un code de sécurité », rassure Sokhna Dièye, agent compliance pour un opérateur de la place.
Chargée de la sécurité des transactions des clients, la dame détaille la dernière trouvaille de leur service. « Avant qu’une transaction ne soit effectuée, nous recevons, au niveau du centre de traitement, une alerte. C’est après vérification auprès du gérant du service de transfert, que nous autorisons ou bloquons la transaction. » « Aujourd’hui, les cas de piratage ont diminué », se félicite-t-elle tout en tapotant le clavier de son ordinateur. Elle ajoute : « Tu me vois là ! Justement, je suis en train d’installer à distance des systèmes de sécurité sur les ordinateurs des distributeurs. Pour chaque ordinateur, il est demandé un code que seul le prestataire certifié connaît. »
Aujourd’hui, le marché des transferts d’argent est florissant. Et la sécurité constitue l’un des importants enjeux pour qui veut tirer partie de la concurrence.
Mame Seynabou THIAM et Aliou FAYE